En décembre 2018, des chercheurs de l’Agence de la santé publique du Canada a publié le rapport de surveillance « Le VIH au Canada : 2017 ». Dans l’article du Rapport sur les maladies transmissibles au Canada (RMTC), les chercheurs minimisent l’ampleur de l’impact de l’augmentation des taux de VIH, et même l’existence de cette hausse. La réponse du Canada au VIH doit en fait être renforcée pour répondre à ces réalités, et ne pas être laissée à traîner dans un climat de complaisance. La lutte contre le VIH n’est pas gagnée et nous ne pouvons pas faire preuve de complaisance lorsqu’en moyenne 6,6 nouveaux cas de VIH, jour après jour, sont diagnostiqués.
Nombre de nouveaux cas d’infection
Dans une interprétation des données qui est peut-être la plus incongrue, les chercheurs qualifient de « légère » l’augmentation de 3 % du nombre de nouveaux cas d’infection par le VIH, de 2016 à 2017. Cependant, si nous examinons leurs données de plus près, nous constatons qu’il s’agit en fait de la plus forte augmentation observée depuis 1997.
Nous pouvons remarquer les faits suivants, dans les données sur le nombre de cas et le taux d’infection :
- Le nombre de nouveaux cas d’infection en 2016 constitue la plus grande augmentation d’une année à la suivante depuis 1997.
- Le nombre de nouveaux cas d’infection était en baisse depuis 2009, mais connaît une résurgence depuis quatre ans.
- Le taux d’infection par 100 000 habitants demeurait le même ou diminuait, depuis 7 ans, mais a augmenté de manière marquée en 2016, dans une mesure de 10,3 %, ce qui constitue (comme le nombre de cas) la plus forte augmentation dans les statistiques. Cette augmentation a continué en 2017, quand il y a été une augmentation de 1,6 % du nombre de nouveaux cas d’infection par 100 000 habitants.
Distribution géographique
En général, l’interprétation présentée dans l’article du RMTC est plutôt simple. On peut tirer les observations suivantes, à partir données présentées dans l’article :
- Les deux provinces ayant la plus grande proportion des nouveaux cas d’infection sont l’Ontario (935 nouveaux cas, pour 38,9 % du total) et le Québec (670 nouveaux cas, pour 27,9 % du total).
- Les deux provinces ayant enregistré le plus haut taux de diagnostic sont la Saskatchewan (15,5 nouveaux cas par 100 000 habitants) et le Québec (8,0 nouveaux cas par 100 000 habitants).
- La différence entre la plus grande proportion des nouveaux cas et le plus haut taux de diagnostic démontre qu’il est important non seulement de réduire le nombre d’infections, mais aussi de prendre en considération l’impact que le VIH peut avoir dans une communauté lorsque les taux d’infection sont élevés.
Distribution selon l’âge
Dans les tableaux supplémentaires, l’information sur l’âge est désagrégée à la fois selon le sexe et l’emplacement géographique. On peut observer les faits suivants à partir des données :
- Les enfants de moins de 15 ans, le groupe d’âge des 30 à 39 ans, et le groupe d’âge des 40 à 49 ans ont connu une augmentation du nombre de nouveaux cas d’infection entre 2016 et 2017.
- Les jeunes de 15 à 29 ans comptaient pour une part de :
- 22,6 % (545) des cas en 2017
- 24,6 % (574) des cas en 2016
- 26,6 % (558) des cas en 2015
- 23,2 % (475) des cas en 2014
- 23,9 % (493) des cas en 2013
- 24,4 % (507) des cas en 2012.
- Entre 2016 et 2017, les jeunes de 15 à 19 ans ont connu une baisse de 17 % alors que les jeunes de 20 à 29 ans ont connu une baisse de 4 %.
- D’où l’importance de s’occuper des deux groupes – un nombre identique d’infections peut avoir un impact très différent sur le total.
- Les adultes de 30 à 39 ans étaient le groupe présentant la plus forte hausse du nombre total de cas (746 nouveaux diagnostics).
- Parmi les personnes de 50 ans et plus, le nombre de cas et la proportion du nombre total des nouveaux cas qu’elles représentent sont en hausse depuis 2012, avec une légère baisse en 2017. Il faut que nous continuions de suivre ce nombre pour analyser les besoins spécifiques des adultes plus âgés avec une nouvelle infection du VIH.
Distribution selon le sexe/genre
Note : Le binaire de genre a été tenu pour acquis dans la majeure partie des données présentées. Dans certains des tableaux, on observe une troisième option, mais elle englobe « sexe non indiqué », transsexuel et transgenre.
- Depuis 2012, la proportion des personnes nouvellement diagnostiquées qui s’identifient comme étant des femmes est demeurée stable, aux environs de 22-25 %.
Distribution selon la catégorie d’exposition
Bien qu’il y ait eu augmentation du nombre et de la proportion de nouvelles infections par le VIH attribuables à l’injection de drogues, cette catégorie n’est pas la seule qui connaît une hausse et n’est pas celle qui présente l’augmentation la plus marquée ou la plus soutenue des cinq dernières années. D’autres catégories d’exposition ont aussi connu une hausse, comme les rapports hétérosexuels entre personnes ne venant pas de pays où le VIH est endémique, qui a connu une augmentation tant pour le nombre que pour la proportion du total. Si l’on ne concentre l’attention que sur les préjudices de l’épidémie d’opioïdes, on risque de laisser de côté des personnes qui pourraient tenir erronément pour acquis qu’elles ne sont pas à risque. On a remarqué une légère augmentation du nombre d’infections parmi des immigrants d’un pays où le VIH est endémique, mais on peut attribuer cette augmentation aux taux d’immigration plus élevés en général.
Données brutes sélectionnées
Nombre de cas de VIH déclarés, 1996-2016
Les données sur le nombre de cas et le taux par 100 000 habitants sont tirées de Bourgeois et coll. 2017, Figure 1; les taux de variation ont été calculés à partir de ces données.
Année | # de cas | % de changement sur l’année précédente | Taux par 100 000 | % de changement sur l’année précédente |
1996 | 2712 | 9,2 | ||
1997 | 2 441 | -10,0 % | 8,2 | -10,9 % |
1998 | 2 262 | -7,3 % | 7,5 | -8,5 % |
1999 | 2 176 | -3,8 % | 7,2 | -4,0 % |
2000 | 2 062 | -5,2 % | 6,7 | -6,9 % |
2001 | 2 195 | 6,5 % | 7,1 | 6,0 % |
2002 | 2 435 | 10,9 % | 7,8 | 9,9 % |
2003 | 2 442 | 0,3 % | 7,7 | -1,3 % |
2004 | 2 489 | 1,9 % | 7,8 | 1,3 % |
2005 | 2 451 | -1,5 % | 7,6 | -2,6 % |
2006 | 2 497 | 1,9 % | 7,7 | 1,3 % |
2007 | 2 402 | -3,8 % | 7,3 | -5,2 % |
2008 | 2 599 | 8,2 % | 7,8 | 6,8 % |
2009 | 2 365 | -9,0 % | 7,0 | -10,3 % |
2010 | 2 300 | -2,7 % | 6,8 | -2,9 % |
2011 | 2 273 | -1,2 % | 6,6 | -2,9 % |
2012 | 2 073 | -8,8 % | 6,0 | -9,1 % |
2013 | 2 059 | -0,7 % | 5,9 | -1,7 % |
2014 | 2 051 | -0,4 % | 5,8 | -1,7 % |
2015 | 2 096 | 2,2 % | 5,8 | 0,0 % |
2016 | 2 331 | 11,2 % | 6,4 | 10,3 % |
2017 | 2 402 | 3,0 % | 6,5 | 1,6 % |
Données fournies sur le sexe/genre
Les données sur le nombre de cas sont tirées du Tableau supplémentaire 5; les pourcentages ont été calculés.
Hommes | Femmes | Sexe non indiqué/ transsexuel/transgenre | Total | ||||
Cas | % | Cas | % | Cas | % | Cas | |
2007 | 1 776 | 74,5 % | 589 | 24,8 % | 7 | 0,0 % | 2 372 |
2008 | 1 903 | 74,2 % | 658 | 25,7 % | 4 | 0,0 % | 2 565 |
2009 | 1 740 | 74,4 % | 593 | 25,4 % | 6 | 0,0 % | 2 339 |
2010 | 1 746 | 76,8 % | 516 | 22,7 % | 11 | 0,0 % | 2 273 |
2011 | 1 713 | 76,1 % | 527 | 23,4 % | 11 | 0,0 % | 2 251 |
2012 | 1 574 | 76,6 % | 476 | 23,2 % | 5 | 0,0 % | 2 055 |
2013 | 1 591 | 78,2 % | 435 | 21,4 % | 9 | 0,0 % | 2 035 |
2014 | 1 542 | 75,6 % | 490 | 24,0 % | 7 | 0,0 % | 2 039 |
2015 | 1 583 | 76,0 % | 495 | 23,8 % | 5 | 0,0 % | 2 083 |
2016 | 1 771 | 76,5 % | 536 | 23,2 % | 8 | 0,0 % | 2 315 |
2017 | 1 777 | 75,1 % | 584 | 24,7 % | 5 | 0,0 % | 2 366 |