Une analyse du Rapport de surveillance Le VIH au Canada : 2016

En décembre 2017, des chercheurs de l’Agence de la santé publique du Canada et de l’École de santé publique Dalla Lana de l’Université de Toronto ont publié le rapport de surveillance « Le VIH au Canada : 2016 » et des Tableaux supplémentaires. Dans l’article du Rapport sur les maladies transmissibles au Canada (RMTC), les chercheurs minimisent l’ampleur de l’impact de l’augmentation des taux de VIH, et même l’existence de cette hausse. La réponse du Canada au VIH doit en fait être renforcée pour répondre à ces réalités, et ne pas être laissée à traîner dans un climat de complaisance. La lutte contre le VIH n’est pas gagnée et nous ne pouvons pas faire preuve de complaisance lorsqu’en moyenne 6,4 nouveaux cas de VIH, jour après jour, sont diagnostiqués.

Nombre de nouveaux cas d’infection

Dans une interprétation des données qui est peut-être la plus incongrue, les chercheurs qualifient de « légère » l’augmentation de 11,6 % du nombre de nouveaux cas d’infection par le VIH, de 2015 à 2016. Cependant, si nous examinons leurs données de plus près, nous constatons qu’il s’agit en fait de la plus forte augmentation observée depuis 1997 (voir ce tableau contenant les données de leur Figure 1 accompagnées des taux de variation calculés).

Nous pouvons remarquer les faits suivants, dans les données sur le nombre de cas et le taux d’infection :

  • Le nombre de nouveaux cas d’infection en 2016 constitue la plus grande augmentation d’une année à la suivante depuis 1997.
  • Le nombre de nouveaux cas d’infection était en baisse depuis 2009, mais connaît une résurgence depuis deux ans.
  • Le taux d’infection par 100 000 habitants demeurait le même ou diminuait, depuis 7 ans, mais a augmenté de manière marquée en 2016, dans une mesure de 10,3 %, ce qui constitue (comme le nombre de cas) la plus forte augmentation dans les statistiques.

Distribution géographique

En général, l’interprétation présentée dans l’article du RMTC est plutôt simple. On peut tirer les observations suivantes, à partir données présentées dans l’article :

  • Les deux provinces ayant la plus grande proportion des nouveaux cas d’infection sont l’Ontario (881 nouveaux cas, pour 37,6 % du total) et le Québec (593 nouveaux cas, pour 25,3 % du total).
  • Les deux provinces ayant enregistré le plus haut taux de diagnostic sont la Saskatchewan (15,1 nouveaux cas par 100 000 habitants) et le Manitoba (9,5 nouveaux cas par 100 000 habitants).
  • La différence entre la plus grande proportion des nouveaux cas et le plus haut taux de diagnostic démontre qu’il est important non seulement de réduire le nombre d’infections, mais aussi de prendre en considération l’impact que le VIH peut avoir dans une communauté lorsque les taux d’infection sont élevés.

Distribution selon l’âge

Dans les tableaux supplémentaires, l’information sur l’âge est désagrégée à la fois selon le sexe et l’emplacement géographique. On peut observer les faits suivants à partir des données :

  • Tous les groupes d’âge ont connu une augmentation du nombre de nouveaux cas d’infection, entre 2015 et 2016.
  • Les jeunes de 15 à 29 ans comptaient pour une part de :
    • 24,6 % (574) des cas en 2016
    • 26,6 % (558) des cas en 2015
    • 23,2 % (475) des cas en 2014
    • 23,9 % (493) des cas en 2013
    • 24,4 % (507) des cas en 2012.
  • Entre 2015 et 2016, les jeunes de 15 à 19 ans présentaient la plus forte augmentation proportionnellement (20 %) alors que les jeunes de 20 à 29 ans avaient la plus faible augmentation proportionnellement (1,5 %), bien qu’ils eurent le même nombre de nouveaux cas enregistrés.
    • D’où l’importance de s’occuper des deux groupes – un nombre identique d’infections peut avoir un impact très différent sur le total.
  • Les adultes de 30 à 39 ans étaient le groupe présentant la plus forte hausse du nombre total de cas (99 nouveaux diagnostics).
  • Parmi les personnes de 50 ans et plus, le nombre de cas et la proportion du nombre total des nouveaux cas qu’elles représentent sont en hausse depuis 2012.

Distribution selon le sexe/genre

Note : Le binaire de genre a été tenu pour acquis dans la majeure partie des données présentées. Dans certains des tableaux, on observe une troisième option, mais elle englobe « sexe non indiqué », transsexuel et transgenre (voir ce tableau sur les données relatives au genre).

  • Depuis 2012, la proportion des personnes nouvellement diagnostiquées qui s’identifient comme étant des femmes est demeurée stable, aux environs de 22-24 %.

Distribution selon la catégorie d’exposition

Bien qu’il y ait eu augmentation du nombre et de la proportion de nouvelles infections par le VIH attribuables à l’injection de drogues, cette catégorie n’est pas la seule qui connaît une hausse et n’est pas celle qui présente l’augmentation la plus marquée ou la plus soutenue des cinq dernières années. D’autres catégories d’exposition ont aussi connu une hausse, comme les rapports hétérosexuels entre personnes ne venant pas de pays où le VIH est endémique, qui a connu une augmentation tant pour le nombre que pour la proportion du total. Si l’on ne concentre l’attention que sur les préjudices de l’épidémie d’opioïdes, on risque de laisser de côté des personnes qui pourraient tenir erronément pour acquis qu’elles ne sont pas à risque.

Données brutes sélectionnées

Nombre de cas de VIH déclarés, 1996-2016

Les données sur le nombre de cas et le taux par 100 000 habitants sont tirées de Bourgeois et coll. 2017, Figure 1; les taux de variation ont été calculés à partir de ces données.

Année # de cas % de changement sur l’année précédente Taux par 100 000 % de changement sur l’année précédente
1996 2712 9,1
1997 2 444 -9,9 % 8,1 -11, %
1998 2 262 -7,4 % 7,5 -7,4 %
1999 2 176 -3,8 % 7,1 -5,3 %
2000 2 062 -5,2 % 6,7 -5,6 %
2001 2 195 6,5 % 7,1 6,0 %
2002 2 436 11,0 % 7,7 8,5 %
2003 2 441 0,2 % 7,7 0,0 %
2004 2 493 2,1 % 7,8 1,3 %
2005 2 455 -1,5 % 7,6 -2,6 %
2006 2 509 2,2 % 7,7 1,3 %
2007 2 403 -4,2 % 7,3 -5,2 %
2008 2 599 8,2 % 7,8 6,8 %
2009 2 364 -9,0 % 7 -10,3 %
2010 2 300 -2,7 % 6,7 -4,3 %
2011 2 276 -1,0 % 6,6 -1,5 %
2012 2 073 -8,9 % 5,9 -10,6 %
2013 2 060 -0,6 % 5,8 -1,7 %
2014 2 053 -0,3 % 5,8 0,0 %
2015 2 100 2,3 % 5,8 0,0 %
2016 2 344 11,6 % 6,4 10,3 %

Données fournies sur le sexe/genre

Les données sur le nombre de cas sont tirées du Tableau supplémentaire 5; les pourcentages ont été calculés.

Hommes Femmes Sexe non indiqué/ transsexuel/transgenre Total
Cas % Cas % Cas % Cas
2006 1 793 72,2 % 683 27,5 % 6 0,2 % 2 482
2007 1 776 74,9 % 589 24,8 % 7 0,3 % 2 372
2008 1 903 74,2 % 658 25,7 % 4 0,2 % 2 565
2009 1 740 74,4 % 593 25,4 % 6 0,3 % 2 339
2010 1 747 76,8 % 516 22,7 % 11 0,5 % 2 274
2011 1 713 76,1 % 527 23,4 % 11 0,5 % 2 251
2012 1 574 76,6 % 476 23,2 % 5 0,2 % 2 055
2013 1 591 78,2 % 435 21,4 % 9 0,4 % 2 035
2014 1 543 75,6 % 491 24,1 % 7 0,3 % 2 041
2015 1 584 75,9 % 498 23,9 % 4 0,2 % 2 086
2016 1 781 76,5 % 540 23,2 % 7 0,3 % 2 328

 

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